Contrairement à ceux qui, orphelins ou abandonnés, souffrent de l’absence d’un de leurs parents, certains enfants ont eu des parents un peu trop présents ou, pourrait-on dire, « mal-présents ». Et paradoxalement, il peut être plus simple de composer avec la blessure de l’absence, que de vivre une relation difficile avec son père ou sa mère.
L’enfance, une empreinte qui marque pour longtemps
Tout ce qu’un parent sème pendant l’enfance, puis l’adolescence, restera présent, et même souvent actif, dans la relation avec son enfant, même devenu adulte. Car on reste toujours « enfant » de ses parents : on les appelle toute sa vie « papa » et « maman », même quand ils deviennent dépendants de nous.
Un père ou une mère qui n’est pas à la juste place peut donc produire des effets durables et aliénants tels que : sentiment de culpabilité, conflit de loyauté, dépendance, haine, infantilisation, répétition de scénario de vie, immaturité, difficulté à se prendre en charge…
Identifier ce qui ne va pas
Certaines personnes peuvent s’avérer encombrantes en tant que parent et générer plus ou moins de souffrance chez leurs enfants. Certaines ont une personnalité et un tempérament si forts qu’il est parfois difficile d’avoir le sentiment d’ « exister » auprès d’elles.
C’est souvent le cas des personnes douées de talents hors du commun : artistes, hommes de pouvoir, célébrités… Mais c’est aussi vrai pour beaucoup d’hommes et de femmes très ordinaires, qui ont une tendance naturelle à prendre une grande place, et de ce fait, à en laisser peu aux autres.
Dans d’autres cas, ce sont les circonstances de la vie qui font qu’un parent est amené à être fortement présent auprès d’un enfant : maladie, deuil, difficultés matérielles, crise conjugale…
Quelle qu’en soit la raison, remettre son père ou sa mère à la juste place demande un vrai travail en cas de dérapages comportementaux ou relationnels tels que : rejet, préférence envers un autre enfant, manque affectif, enfant « parentifié », autoritarisme, intrusion, emprise, relation fusionnelle, projections et attentes démesurées, inceste, maltraitance, … ou tout autre forme de violence bien évidemment.
Prendre du recul
Après l’étape de la prise de conscience vient celle de la prise de distance. « Vos enfants ne sont pas vos enfants » dit Khalil Gibran. On peut tout aussi bien l’appliquer à ses parents : ils sont nos parents, certes, mais ils ne sont pas que cela. Ils ont été eux-mêmes enfants et ont leur histoire personnelle différente de la nôtre, dont nous ne savons pas tout, avec leurs propres parents, et peut-être des manques à combler, des blessures à réparer…
Il y a aussi la question du rôle de l’autre parent : quelle place a-t-il occupée, quel rôle a-t-il joué ? A-t-il vu et laissé faire ?… Cela l’arrangeait-il et pourquoi ?…
Les parents parfaits n’existent pas… Le parent dont on a du mal à se défaire a, certes, des défauts, mais il a sans doute aussi des qualités, ou au moins, on y trouve des « avantages »…
Il n’est jamais trop tard…
L’idéal est de pouvoir dialoguer, mais ce n’est pas toujours possible, soit par crainte d’émotions trop fortes ou parce qu’on pense que le parent n’est pas prêt à écouter, ou parce que le parent à qui on voudrait s’adresser est déjà décédé…
On peut alors envisager d’écrire, seul ou en faisant appel à un professionnel de la relation d’aide. La lettre facilite la mise à distance. Et peut-être même qu’une fois écrite, on ne trouvera pas nécessaire de l’envoyer… Car l’écriture a bien souvent par elle-même une vertu thérapeutique. On peut aussi mettre en scène son histoire à travers un récit narratif allégorique.
On peut choisir de s’adresser à son père ou à sa mère à travers un « psychodrame » où quelqu’un d’autre joue le rôle du parent concerné.
On peut aussi utiliser la technique du modelage ou de la visualisation : à partir d’une grande dimension, on rapetisse progressivement l’image de son père ou de sa mère jusqu’à une proportion où on se sente bien.
SI l’on peut, l’idéal est de pouvoir parvenir à pardonner, c’est ce qui libère pleinement. Si c’est trop difficile, on peut là aussi se faire accompagner sur le plan psychologique. Et, si l’on est croyant, sur le plan spirituel.